Séance du 13 décembre 2014 au Rucher école de Rocamadour: Biologie de l'abeille

1 Histoire de l'apiculture

On a retrouvé une trace des premiers hommes cueilleurs de miel sur une peinture rupestre, dans la grotte de l'araignée (cueva de la Araña), près de Valence en Espagne. Elle daterait d'environ 8 000 ans avant J.C. Elle représente un homme suspendu à 3 lianes qui récolte du miel entouré de quelques abeilles stylisées. Les peintures rupestres représentant les scènes de cueillette de miel montrent déjà l’utilisation de la fumée.
Les Egyptiens avaient également découvert les abeilles et leurs produits. Les premières traces datent de 2400 avant. J.C. Le miel était d'ailleurs apporté en offrande aux dieux. Du miel, ils tiraient également une boisson fermentée: l'hydromel.
Le miel était aussi utilisé pour la production de médicaments sur base de ses propriétés anti-bactériennes et anti-fongiques. La cire servait également: dans la momification, dans la construction de bateaux et comme agent liant dans les peintures.
Au Moyen Age le seul produit, que l'on connaissait pour sucrer était le miel. C'était donc un produit relativement rare et cher.
L'abeille fut dans l'histoire un symbole royal et impérial,le miel considéré comme une nourriture digne des puissants.
Napoléon Premier, Empereur souhaitait que le symbole de l'abeille soit omniprésent, de son manteau de sacre aux motifs de ses tapis.
Au XIXéme siècle, le vol de ruche était lourdement sanctionné : 5 ans de réclusion pour le vol de deux ruches (1828, Cour d'Assises de Douai)

2 Classification systématique
Une observation attentive permet de classer les abeilles dans l’embranchement des arthropodes, aux côtés des arachnides (les araignées) ou des crustacés : tous ces animaux se caractérisent, en effet, par des téguments composés de chitine, un corps formé de segments articulés, des yeux composés et d’autres caractères encore.
Au sein du groupe des arthropodes, les abeilles présentent une série de caractères particuliers, ce qui conduit à les regrouper dans un ensemble homogène, la classe des insectes : les abeilles possèdent, en effet, six pattes, deux paires d’ailes et un corps divisé en trois parties distinctes (tête, thorax et abdomen).
La classe des insectes comprend 32 ordres, dont celui des hyménoptères, celui des lépidoptères (les papillons) ou encore celui des diptères (les mouches).
Les abeilles appartiennent à l’ordre des hyménoptères et en présentent bien entendu les caractéristiques :

  • métamorphose complète, c’est-à-dire que le développement passe par les stades œuf, larve, nymphe et finalement imago,
  • ailes membraneuses et couplées par des crochets,
  • pièces buccales de type broyeur-lécheur,
  • parthénogenèse présente chez beaucoup d’espèces.

Parmi les hyménoptères, les abeilles se distinguent par la présence d’une « taille de guêpe » (thorax séparé de l’abdomen par un rétrécissement étroit) et d’un aiguillon chez les femelles; elles forment le groupe des apocrites aculéates. Ce groupe comprend plusieurs super-familles, dont celles des Formicoidea (les fourmis), des Vespoidea (les guêpes) et bien entendu des Apoidea (les abeilles).
La figure ci-dessous vous aidera à situer l’abeille dans le monde des insectes, plus spécialement dans l’ordre des hyménoptères (extrait du livre « être performant en apiculture »).


Classification de l’abeille parmi les insectes
Les abeilles – ou apoïdes – forment un groupe d’hyménoptères extrêmement diversifiés. Le terme « abeille » peut tout aussi bien désigner l’abeille des ruches, ou abeille domestique, qu’une des 20000 autres espèces d’abeilles si on prend ce terme au sens large que lui donnent les zoologistes.
Les abeilles sont réparties en groupes plus homogènes, les familles. Parmi celles-ci, la famille des Apidae regroupe les espèces dont le degré de socialisation est le plus élevé, mais aussi quelques espèces solitaires; ce sont des insectes à langue longue, par rapport à d’autres familles d’espèces solitaires et à langue courte. Des caractères morphologiques permettent également de distinguer les différentes familles.
Au sein de la famille des Apidae, se trouvent plusieurs genres, et notamment les bourdons, qu’il ne faut pas confondre avec les faux-bourdons, les mâles de l’abeille domestique;
Les abeilles du genre Apis vivent en colonies permanentes et se reproduisent par essaimage.
Il existe 9 espèces du genre Apis dont :

  • Apis florea se trouve en Inde, Malaisie, Java et Bornéo. C’est la plus petite abeille. On la rencontre uniquement en plaine, en dessous de 500 mètres. Le nid est composé d’un seul rayon.
  • Apis dorsata est répandue sur un large territoire de l’Asie Sud-orientale (Inde, Sud de la Chine, Philippines, Archipel Indonésien). Le nid est également formé d’un seul rayon.
  • Apis cerana, la plus proche de l’abeille européenne. On la rencontre en Asie méridionale et orientale, partout où les abeilles peuvent s’installer. On l’élève facilement dans des ruches.
  • Apis mellifera, la seule espèce indigène en Europe et en Afrique; on la trouve aussi dans d’autres contrées où elle a été introduite (Amérique, Australie).

Dans le cas de l’abeille, on ajoute souvent un troisième nom pour désigner la sous-espèce ; Apis Mellifera compte 23 sous-espèces .
Par exemple Apis mellifera mellifera pour l’abeille noire d’Europe occidentale (notre abeille!). Une autre dénomination est souvent utilisée, Apis mellifica mellifica
Il existe aussi plus de 900 espèces d'abeilles sauvages en France trouvant refuge dans les anfractuosités des murs, dans le sol ou même dans les tiges creuses des végétaux. Ces abeilles ne vivent pas en communauté aussi importantes que les abeilles domestiques. Souvent solitaires et farouches, elles sont presque invisibles pour un œil non averti, se fondant dans la masse des autres insectes volants. Parmi les plus connues citons, les osmies ou « abeilles maçonnes », et le bourdon terrestre.
Ces abeilles jouent un rôle primordial dans la préservation de la biodiversité, c’est-à-dire la richesse de la flore et de la faune. Ils pollinisent notamment 80% des plantes à fleurs sauvages ! Sans eux, ces espèces disparaissent, et c’est alors toute la chaîne alimentaire qui s’en trouve atteinte…

3 Corps de l'abeille (ouvrière)
1 - La tête
Elle comporte deux grands yeux latéraux composés de près de 4000 facettes, trois yeux simples ou ocellesdeux antennes coudées composées de douze articles recouverts de poils, des pièces buccales (qui ne permettent pas de déchirer la peau d'un fruit contrairement à celles de la guêpe) : la langue (Pièce buccale mobile, allongée et velue, permettant la récolte du nectar). la mandibule (Pièce buccale dure et cornée servant de pince pour saisir la nourriture; elle sert aussi à pétrir la cire pour construire des alvéoles) , et le palpe labial (Organe buccal sensoriel ayant notamment des fonctions olfactives et gustatives). . Sur le dessus de sa tête l'abeille possède deux antennes qui lui permette de communiquer, de se repérer et sentir les odeur des fleurs qu'elles doivent butiner.
A l'intérieur de la tête on trouve le cerveau, les glandes hypopharyngiennes (produisent la gelée royale, des enzymes), salivaires (signature chimique de la colonie) et mandibulaires (phéromones). La tête est différente chez l'ouvrière, la reine ou le faux bourdon. Nous parlerons ici de l'anatomie de l'ouvrière
2 - Le thorax
Il est formé de trois anneaux fusionnés qui portent chacun une paire de pattes et deux paires d'ailes membraneuses. Il contient aussi des muscles très puissants qui permettent de battre des ailes et 3 paires de stigmates (=poumons) . Les ailes antérieures et postérieures peuvent être attachées ensemble ou séparées (crochets). Les pattes antérieures se prolongent par deux crochets et par un organe adhésif qui permet aux insectes de s'accrocher à n'importe quelle surface.Les pattes avant sont munies de « peignes » en poils courts et rigides que l'abeille utilise pour nettoyer ses antennes. Les postérieures dans lesquelles sont aménagées des « corbeilles », sont prévues pour la récolte et le transport du pollen. Une paire de petits orifices destinés à la respiration se trouve sur la partie ventrale.
3 - L'abdomen
L'abdomen est formé de sept segments dont six sont visibles. Ils sont composés d'une plaque dorsale et ventrale rigides, reliées par une fine lame chitineuse souple.  7 paires de stigmates servant à l'expiration se situent sous les segments un à six, tandis que les glandes cirières de Nasanov (phéromones) apparaissent sous les trois derniers éléments. Le dernier porte un aiguillon venimeux appelé dard.
L'abdomen contient également le système digestif, respiratoire, reproducteur, le rectum, l'organe venimeux et deux éléments du système nerveux (le protocérébron et le deutocérébron) mais aussi le système circulatoire ; C'est l'hémolymphe qui assure le transport des éléments nutritifs, les déchets cellulaires et les hormones.

4 L'appareil respiratoire
Les trachées sont des canaux élastiques qui s'ouvrent grâce à la spirale chitineuse qui revêt intérieurement leur paroi et qui communiquent avec l'extérieur par des orifices appelés stigmates. Disposés à des endroits bien précis du thorax et de l'abdomen, les stigmates sont pourvus tout autour de leur ouverture extérieure d'une couronne de soies agissant comme un filtre protecteur des trachées. Les canaux aboutissent dans deux grosses trachées, appelées sacs aériens, communicants entre eux par des fentes. A partir de ces sacs, d'autres trachées se ramifient en trachéoles à travers lesquelles l'oxygène est acheminé vers les tissus. L'abeille possède trois paires de stigmates sur le thorax et sept paires sur l'abdomen. L'inspiration de l'air se fait à travers les stigmates abdominaux, l'expiration à travers les stigmates thoraciques.
Les sacs aériens constituent des sortes de "réservoir" d'air et permettent de pallier tout risque d'asphyxie; ils réduisent en outre le poids spécifique de l'abeille et facilitent le vol.

5 L'appareil circulatoire
Il est à la fois circulatoire et lacunaire, c'est à dire que le sang circule à la fois à l'intérieur des vaisseaux mais aussi dans un système de lacunes.
Le cœur est composé de deux parties séparées par un étranglement : l'aorte et le ventricule. L'hémolymphe ( qui est le sang de l'abeille) circule de la tête vers les lacunes, d'avant en arrière. C'est une substance fluide, laiteuse et incolore qui entre en contact avec les tissus contenant des substances nutritives, il a également une fonction respiratoire en transportant l'oxygène aux tissus et il absorbe les déchets contenus dans ces tissus en les transportant jusqu'aux tubes de Malpighi. 

6 L'appareil digestif

- l'intestin antérieur, formé du pharynx, de l'œsophage, du jabot et du sac chylifique ou estomac

- l'intestin moyen (le ventricule), siège de la digestion et de l'assimilation de la nourriture

- l'intestin postérieur, dernière portion de l'appareil digestif composé de l'intestin grêle, souple et court et du gros intestin beaucoup plus développé, avec à son extrémité un renflement constitué par la vésicule rectale à l'intérieur de laquelle l'abeille conserve ses excréments pendant l'hiver. Pour maintenir sa température corporelle et donc celle de la colonie, l’abeille consomme du miel. Fatalement, cette combustion laisse quelques déchets qui s’accumulent dans l’ampoule rectale de l’abeille. Son extensibilité lui permet de rester plusieurs semaines sans expulser ses matières fécales. Comme l’abeille possède une qualité très développée de propreté, elle ne se libère pas dans la ruche, mais attend que les conditions météo le permettent pour sortir. C’est ainsi que dès les premières heures d’une belle journée, nos abeilles se précipitent pour vider leur intestin non loin de la ruche (vol de propreté).

- Les tubes de Malpighi (reins de l'abeille) sont des canaux qui plongent librement dans le sang. Une des extrémités est fermée, l'autre ouverte sur le tube digestif. Les déchets contenus dans le sang , passent par osmose, dans ces tubes et sont expulsés avec les excréments.

L'alimentation des abeilles se compose essentiellement de nectar, d'eau et de pollen.
L'eau sert à climatiser la ruche. En effet pour ventiler les abeilles ont besoin d'une grande quantité d'eau.
L'eau sert aussi à faire la gelée nourricière (sorte de bouillie) et à ramollir le miel.
Le miellat est une substance sucrée produite par les pucerons que les abeilles apprécient ; Le miel de sapin est fait à partir du miellat. L'inconvénient c'est que certains de ces miellats durcissent rapidement rendant leur consommation impossible par les abeilles. Elles meurent alors autour de ces « fausses » provisions. Ceci constitue un danger pour les abeilles. C'est la reine qui meurt en premier.
Les larves sont toutes alimentées pendant 3 jours avec de la gelée royale puis les larves d'ouvrières ou de mâles sont nourries avec une bouillie ou gelée nourricière à base d'eau, de pollen et de gelée royale alors que les larves de reine continuent à ne recevoir que la gelée royale.

7 Les sens de l'abeille
La perception visuelle se fait au travers:

Un ocelle est composé d'une simple lentille et de quelques cellules rétiniennes. Il ne sert pas à rendre une image mais plutôt à détecter l'intensité de la lumière. Dans la ruche, les ocelles permettent à l'abeille de s'orienter vers la sortie.
Grâce à ses 2 yeux composés de 4 à 6000 facettes, l'abeille perçoit les couleurs, mais de manière décalée par rapport à l'homme. En effet, l'abeille perçoit les couleurs allant de l'ultra-violet (300 nm) à l'orange (650 nm), tandis que l'homme perçoit du violet (400 nm) au rouge (700 nm).
L'abeille ne perçoit donc pas le rouge.
La fréquence de rafraîchissement de l'image est de 100 Hertz (20 Hertz chez l'homme). Celle-ci est particulièrement adaptée à la perception d'objets volants (les autres abeilles) et au défilement du paysage.
L'odorat de l'abeille passe par ses antennes qui sont les organes centraux de la perception de l'environnement.
Les antennes portent des sensilles , chacune spécialisée dans une détection particulière : CO2, humidité, odeurs, goût, vibrations, ouïe, phéromones...
Cette capacité à détecter le taux d'humidité permet aux abeilles d'apprécier la qualité du miel (<18% d'humidité)
Le toucher
C'est aussi grâce aux flagelles des antennes que l'abeille perçoit son environnement . Les pattes antérieures participent également à cette perception tactile.
L'ouïe
les abeilles sont sensible à la fois aux sons extérieurs et aux sons qu'elles produisent (il s'agirait d'ailleurs plutôt d'un sens vibratoire)
Trois organes sont impliqués dans cette perception auditive :un dans les pattes antérieures, 2 autres dans les antennes ; les 3 sont très sensibles , elles entendent, elles ressentent les choses et les gens 
Elles communiquent entres elles pour avertir qu'il se passe quelque chose d'anormal. On touche la ruche et elles réagissent, le bourdonnement est différent, elles ne s'affolent pas, elles sont même bien organisées pour se défendre.
Dans une ruche orpheline le bourdonnement est sur une fréquence de 180 à 200 Hz, beaucoup plus aigu. on peut ainsi, avec un sens de l'ouïe entraîné détecter la présence ou non de la reine
(Il y a même une étude assez récente britannique ou canadienne qui prédit les essaimages grâce aux vibrations entendues ... )

8 Le vol de l'abeille
L'abeille cherche la nourriture la meilleure au plus près de la ruche. Elle butine jusqu'à 3500m de la ruche. Elle fait de 10 à 15 voyages par jour soit environ 800 km dans sa vie.
Avant le vol, l'abeille gorge son estomac de miel. Elle le consomme au fur et à mesure du vol. Certains chercheurs ont montré que des abeilles africanisées pouvait transporter environ 30 mg de miel (contenant quelque 20 mg de sucre); ce qui leur permettrait de couvrir environ 60 km.
Pendant le vol, les ailes battent à une fréquence de 400 Hz.
Après avoir ingéré 30 mg de miel, une abeille qui pèse environ 80mg peut sortir récolter 70mg (40mg de nectar et 30mg de pollen)
La vitesse de vol moyenne d'une ouvrière est de 24 km/h.

9 L'orientation
Un chercheur autrichien, Karl von Frisch,  a découvert le prodigieux "langage" des abeilles ; ses travaux lui ont valu un prix Nobel en 1973: lorsqu'une butineuse revient à la ruche au terme d'une exploration, et qu'elle a découvert une source de nourriture, elle exécute dans l'obscurité de la ruche une sorte de danse. Les autres abeilles perçoivent l'agitation de cette excitée et viennent s'agglutiner à elle pour décoder les informations contenues dans ces mouvements. Deux cas de figure se présentent : le type de danse est différent selon que la nourriture se trouve à moins de 100 m, ou à une distance supérieure.Lorsque la nourriture est à moins de 100 m, une danse en rond signale simplement la proximité du repas, sans indication de direction. quand la distance de la source est supérieure à 100 m, des précisions supplémentaires sont nécessaires. L'abeille exécute une danse en forme de 8 qui indique cette fois la distance et la direction du site d'approvisionnement. L'abeille effectue une schématisation qui s'apparente à de l'abstraction : elle transpose sur un cadre de la ruche, dans le plan vertical, l'angle que fait la direction de la nourriture avec la direction du soleil dans le plan horizontal. En clair elle dirige la danse dans une direction qui fait un certain angle par rapport à la verticale ; et cet angle indique la direction de la nourriture par rapport au soleil.
La danse frétillante ou danse en huit, aux motifs très compliqués, indique aussi en fonction des oscillations abdominales et des vibrations émises la distance du butin à récolter. . 
La fréquence d'exécution de la danse est d'autant plus élevée que la source est proche.
10 frétillements/s = 100m
2 frétillements/s = 5000m
Et concernant la quantité, la pourvoyeuse frétille d'autant plus vivement que la source signalée est abondante. 
Les abeilles dansent aussi pour indiquer un endroit favorable à l'implantation de la colonie, mais aussi des points d'eau ou des zones de récolte de résines pour la propolis. Non seulement le lieu est situé précisément, mais des informations quantitatives et qualitatives sont fournies!
10 Langage des abeilles
Les abeilles communiquent entre elles grâce à leurs antennes, aux phéromones (substances chimiques) et aux frétillements.
Grâce aux phéromones, une abeille peut reconnaître sa ruche et même savoir si la reine est présente

11 Castes de la colonie
 Une colonie d’abeilles domestiques compte de 40 000 à 60 000 individus durant la belle saison et chute à 15000, voire 5000 en hiver. 
Chaque colonie est composée de :

  • trois castes d’abeilles adultes : une reine, des ouvrières et des mâles ou faux-bourdons ;
  • du couvain: ensemble des œufs, des larves et des nymphes des abeilles.

La colonie s’organise dans le temps et l’espace afin de subvenir aux besoins des individus qui la constituent et chacun d’eux participe activement à la vie collective :

  • la reine, seule femelle fertile de la colonie, est unique ; totalement dépourvue des organes spécialisés qui caractérisent les ouvrières, elle ne peut récolter elle-même sa nourriture (qui lui est fournie par les ouvrières). Seule la reine pond des œufs susceptibles de générer une descendance pour assurer la pérennité de la colonie ;
  • les ouvrières (femelles non reproductrices) représentent la très grande majorité de la population. Leur activité varie au cours de leur vie : nourrices, nettoyeuses, sécrétrices de cire, butineuses de pollen et de miel. Leur nombre assure, en outre, la régulation thermique de la colonie ;
  • les mâles (quelques centaines), participent dans nos régions d’avril à septembre à la fécondation des reines vierges présentes dans le voisinage. Ils sont tués en septembre.

Phases du cycle du développement d’une colonie d’abeilles
Le cycle naturel d’une colonie est annuel et dépend fortement de la végétation disponible dans l’environnement. En régions tempérées, il débute au printemps. 
Quatre phases successives le caractérisent. 

  • une phase de développement (au printemps), au cours de laquelle la reine pond intensément (de 1 500 à 2 000 œufs par jour), suivie d’une relative stabilité de la population qui se poursuit jusqu’à l’automne, avec une ponte de plus en plus réduite ;
  • une période d’essaimage correspondant à un phénomène de reproduction asexuée. Vers la fin du printemps, alors que la population atteint son maximum, la reine quitte sa ruche avec une partie des ouvrières et va fonder plus loin une nouvelle colonie. Bientôt, une nouvelle reine éclot dans la colonie souche et remplace la reine âgée, partie avec l’essaim ;
  • une phase de préparation à l’hivernage qui permettra le meilleur développement possible des colonies dès le printemps suivant. Pendant cette phase cruciale, la colonie produit les ouvrières qui passeront tout l’hiver.

Ces individus vivront plus longtemps (plusieurs mois) que les butineuses d’été qui récoltent le miel et dont l’espérance de vie normale est de quelques semaines. Les ouvrières hivernantes ont également la tâche de redémarrer l’activité de la colonie au printemps. L’état de santé de ces individus hivernants est capital pour la bonne survie des colonies à la saison froide.

  • une phase hivernale, appelée « hivernage », au cours de laquelle la population, réduite à quelques milliers d’ouvrières regroupées autour de la reine, vit sur les réserves accumulées pendant la belle saison.

Le peuplement et l’évolution de la population d’une ruche varient en fonction de nombreux paramètres
Au printemps, les colonies d’abeilles sortent de leur torpeur hivernale et la reine recommence à pondre. Au cours des mois qui suivent, des milliers de jeunes abeilles verront le jour, et la force de la colonie (la vigueur) ira s’accroissant jusqu’à son point culminant. Si la reine peut vivre jusqu’à cinq années, les ouvrières quant à elles, ont une durée de vie différente selon les périodes de l’année auxquelles les œufs ont été pondus. Les abeilles adultes, dites d’été, sont caractérisées par une durée de vie courte, qui s’échelonne de 20 à 40 jours (ou trois à six semaines) ; elles sont constamment renouvelées.
Celles nées en fin d’été, sont des ouvrières caractérisées par une durée de vie longue (jusqu’à 190 jours ou 27 semaines), puisqu’elles atteindront le printemps suivant. À la fin de l’été, débute la période de déclin de la colonie, durant laquelle le taux de mortalité des abeilles s’élève, tandis que le taux de ponte s’abaisse.
La force de la colonie, définie à la fois par son état physiologique et par la dynamique de sa population d’abeilles, décroît au fil des jours, jusqu’à son niveau d’hivernage en automne. 
L’effectif minimal de la population d’abeilles est enregistré en hiver ; les colonies les plus faibles ne passent pas l’hiver.

12 Les métiers de l'ouvrière
Ils sont différents en fonction de l'âge. Voici les différents métiers effectués par l'ouvrière tout au long de sa vie, de sa naissance à sa mort :
Nettoyeuses :
L’abeille nettoyeuse amène à l’extérieur les déchets et les abeilles mortes. Elle utilise la propolis pour sceller les fissures de la ruche, recouvrir les parois, renforcer les alvéoles et les cadres et embaumer les corps des ennemis morts.
Nourrices de larves :
L’abeille nourrice soigne la couvée en nourrissant les larves plus jeunes avec la gelée royale et les plus âgées avec le pollen et le miel. 
Operculeuses:
Scellent les alvéoles grâce à leur glandes cirières.
Servantes de la reine, puis des autres ouvrières
Les servantes de l’abeille reine s’occupent d’elle, l’entourent et la nourrissent avec la gelée royale.
Nourrices des adultes
Ventileuses:
La régulation thermique dans la ruche est confiée aux ventileuses qui, par leurs battements d’ailes, créent un courant d’air frais qui permet de conserver dans la ruche une température constante d’environ 35°C. La ventilation aide aussi à diffuser dans la ruche des signaux chimiques, les phéromones : chaque famille a en effet sa propre odeur caractéristique
Maçonnes:
L'ouvrière, promue artiste en bâtiment, va sculpter son cadre de vie, le rayon.
Réceptrices de nectar:
De retour au rucher, après avoir passé le contrôle des gardiennes, la butineuse exténuée confie son chargement à une abeille restée à la ruche. La passation s'effectue sous forme de bouche-à-bouche: la trophallaxie. La «donneuse» refoule le contenu de son jabot et dégorge en fines gouttelettes son nectar pour la «receveuse», qui l'avale et le fait transiter à plusieurs reprises entre sa trompe et son jabot. Puis la deuxième ouvrière le régurgite à son tour à une troisième, et ainsi de suite. La précieuse goutte, qui n'est déjà plus du nectar sans être encore du miel, a beau circuler très vite de langue en langue, le travail à la chaîne se poursuit pendant un bon quart d'heure en moyenne. A chaque voyage dans un jabot, la matière première se transforme un peu plus sous l'effet de la salive, des sucs digestifs, de l'acide formique. Les sucres qui composaient le nectar subissent une modification (transformation du saccharose en glucose et lévulose), tandis que la chaleur de la ruche fait s'évaporer l'excès d'eau. Lorsque la teneur en eau est tombée à 50 %, la phase suivante commence: les abeilles déposent la goutte, maintenant épaisse comme du sirop, dans une cellule qu'elles remplissent au quart ou au tiers. Les ventileuses entrent en jeu pour éliminer le surplus d'eau de ce miel encore trop liquide. Battant frénétiquement des ailes, elles organisent des courants d'air au-dessus des alvéoles, favorisant l'évaporation.
Magasinières de pollen, puis de nectar:
Elles mettent en réserve les récoltes
Gardiennes:
La gardienne a pour mission de s'assurer que les abeilles qui pénètrent dans la ruche font bien partie de la colonie, afin d'éviter le pillage de leurs réserves. Elles préviennent également les « soldats » si des intrus se présentent.
Butineuses:
La butineuse est chargée de récolter dans l'environnement proche les éléments nutritifs nécessaires à la colonie. Cette activité démarre à un âge moyen de 21 jours. Si c'est la distance parcourue en vol qui détermine sa longévité, on estime en moyenne la durée de l'activité de butineuse à 4 ou 5 jours.

13 Accouplement
La jeune reine est féconde dès le 5 ou 6ème jour. Si les conditions météorologiques sont favorables (au moins 20°C, il est donc important qu'il fasse beau temps après la naissance des reines), la jeune reine accomplit un vol nuptial, uniquement dans le but d'être fécondée par des mâles, après avoir effectué un ou deux vols d'orientation. Cet accouplement ne peut se faire au nid, avec les mâles (faux-bourdons) de sa colonie, ils sont ses propres fils. La reine s'élance alors très haut, entre dix et trente mètres, pour s'accoupler aux mâles d'une autre ruche, située parfois à plusieurs kilomètres de là (deux vols sont parfois nécessaires). Une vingtaine de mâles sont nécessaires à cette fécondation royale, pour fournir les spermatozoïdes qui rempliront à bloc la spermathèque de la reine qui sera alors féconde pendant 5 ans. Les mâles meurent après l'accouplement. De toute évidence, les mâles n'existent chez les abeilles que pour leur rôle sexuel reproducteur : A l'automne, les mâles improductifs sont tués ou jetés hors de la ruche par les ouvrières sans autre forme de procès. N'ayant pas les moyens de se nourrir ou de se défendre, les faux-bourdons mourront bien vite de faim.
A peine fécondée, la reine pond ses œufs dans les cellules de la ruche appelées alvéoles, à un rythme de 2000 à 3000 par jour pendant le printemps, une reine qui travaille à la chaîne, en quelque sorte. Les alvéoles doivent être absolument propres, dans une zone particulière de la ruche appelée couvain, situé en général en son centre, et la température de la ruche doit se situer autour de 34°.
L'œuf fécondé peut donner une reine ou une ouvrière. L'œuf d'une reine et d'une ouvrière sont à la base identique. C'est une œuf fécondé par un gamète mâle. La différence intervient dès la ponte de l'œuf. En fait, ce sont les ouvrières qui vont décider d'élever une reine en nourrissant l'œuf puis la larve avec de la gelée royale contrairement aux futures ouvrières qui sont nourries avec de la gelée nourricière. La gelée royale est le produit de sécrétion du système glandulaire céphalique des abeilles ouvrières. Cette nourriture contient en moyenne : 4.5% de lipides, 14.5% de sucres majoritairement du glucose et du fructose, 13% de protides (acides aminés à l'état libre ou combiné) et environ 66% d'eau. On y trouve également des vitamines (Vitamines B5) des oligo-éléments, de l'acétylcholine et des facteurs antibiotiques.
Un œuf non fécondé donne un faux bourdon haploïde.

Evolution du couvain


 
Reine Ouvrière Mâle
œuf 3 jours
gelée royale
3 jours
gelée royale
3 jours
gelée royale
Larve 6 jours
gelée royale
6 jours
gelée nourricière
6 jours
gelée nourricière
Nymphe 7 jours
gelée royale
12 jours
gelée nourricière
14 jours
gelée nourricière

 
Adulte Reine à 16 jours Abeille ouvrière à 21 jours Mâle à 23 jours


14 Essaimage
Il permet à la ruche de pérenniser l'espèce.
Il peut avoir lieu entre 10h et 16h, d'avril à mi-juin dans nos régions.
La reine quitte la ruche avec environ les 2/3 des abeilles gavées de miel.
L'essaim se forme rapidement et se pose à proximité de la ruche avant de repartir ( quelques heures plus tard, ou même avant) pour un lieu repéré par les éclaireuses, à moins d'être capturé par l'apiculteur qui a noté l'événement.
L'essaimage coïncide avec un pic de couvain. Il est préparé 2 à 4 semaines à l'avance. Une jeune reine remplacera celle qui est partie et la colonie se repeuplera (une dizaine de larves sont nourries à la gelée royale, la première reine qui naît tue les autres)
La ruche qui a essaimé aura une production de miel quasi nulle : il faut que la nouvelle reine se fasse féconder peu après sa naissance et que, la ponte étant reprise, la ruche se repeuple.

                                                                                                                                                  Isabelle Pestourie